Wadi mhiri
« D’un certain point de vue, le temps n’a pas de sens si ce n’est celui de toujours aller vers l’avant, écraser une à une les secondes, rongeant au passage les ères et les âges sans but précis.
D’un autre point de vue, le temps est une bénédiction, il nous est offert comme une chance dans les abysses de l’univers pour vivre un moment et périr. Il est compté et complètement inconnu.
Les sept obus, au repos, dirigés vers le ciel, attendent leurs heures. A leurs pieds, des compteurs à rebours s’affolent et les rapprochent d’une fin certaine qui ne semble pas les déstabiliser. Il s’en dégage, au contraire, une sérénité suspecte adoucie par les fleurs bleues intégrées dans leurs matrices.
Les secondes et les minutes défilent et la remise à zéro est imminente, le néant n’est pas loin et les obus s’impatientent et attendent l’instant de l’éclosion pour s’épanouir et exister.
Le temps est relatif. Pour un être humain, soixante-quinze ans sont insignifiants comparés à l’âge de l’univers. Pour un obus, juste ces quelques secondes d’explosion, de vie intense et fiévreuse, de dévastation et de jouissance tuant sur son passage des vies.
Son heure de gloire est bien choisie par des enjeux plus importants que des milliers de vies. Son timing est précis et ajusté pour dépasser les maux physiques et s’ancrer sans autorisations et sans limites dans les mémoires et les histoires des peuples. »
Texte rédigé par Neila Mhiri