« Les volets flagellés de balles et le bois poussiéreux laissent pénétrer des rayons de soleil timides et presque désolés de s’être immiscés dans l’ambiance d’une chambre aussi lugubre.
Au milieu, gît un vieux lit à baldaquin aux formes affaissées et aux couleurs effacées par ses larmes déversées en souvenir des belles galipettes d’un couple fraîchement marié, d’un flirt osé de deux adolescents attisé par le feu des interdits, d’une brève accolade passionnée entre la femme de chambre et le jardiner. Le crissement de ses lattes lui parvenait de loin entrainés par ces énergies fiévreuses et amoureuses qu’il a jadis enlacées.
Seul dans l’obscurité, sa carcasse délabrée et réduite à l’esclavage signe la fin honteuse et horrible d’un infime coin de paradis métamorphosé en brasier de l’enfer. Un autel de sacrifice moderne où vierges, femmes respectables et mères de famille sont conduites de force ou pire encore de leur propre gré dans un l’eldorado d’une luxure maquillé vulgairement telle une vieille patronne de bordel.
Dans ce lit se mêle le monde entier, partageant des regards, des soupirs, des gémissements, des pleurs, du sang, des odeurs nauséabondes, des écorchures, des injures, du mépris, l’humain n’est plus.
Les conflits politiques s’approfondissent et le devoir de certains d’assouvir le désir animal des « guerriers » ou plutôt «Jihadistes », car guerriers est bien trop glorifiant, devient la priorité pour revigorer et mettre d’aplomb ces hommes qui tuent, pillent, égorgent, volent sous le slogan de la religion. Ainsi cette dernière qui a interdit la prostitution et les liaisons sexuelles hors mariage se voit tolérer et attribuer des lois exceptionnelles propices aux contraintes du Jihad. Se développe alors le concept d’une prostitution labellisée « Halal ».
Loin de se douter de leurs sorts déjà scellés dès qu’elles s’adonnent au diable, ces femmes signent la plupart du temps leurs arrêts de mort survenue suite à une cadence insoutenable de « Nikah » ou tout bêtement tirées comme du bétail par leurs gourous pour manquement à leur devoir de jihad ou encore lorsqu’elles sont jugées hors d’usage.
En s’allongeant sur ce grand lit, jadis un lieu de paix, transformé en potence, le taux d’adrénaline bondit et toutes les cellules du corps se mettent en alerte sous les pointes menaçantes et imposantes des balles suspendues à son ciel écrivant l’expression « JIHAD ANNIKAH ». La symbolisation est forte. Pendant un moment, vous vous retrouvez piégés sur un carré de mort obnubilé par cette petite prise de risque, submergé par une peur mélangée à la fascination.
Permettez à votre âme d’embrasser ce ciel, de l’octroyer si ce n’est qu’un laps de temps. Laissez votre imagination s’imprégner de l’horreur que peut transmettre ce meuble inoffensif. Pensez à toutes ces femmes qui se défilent dans un couloir de la mort précédée de la perte totale de dignité. N’ayez pas peur de toucher la terreur car elle est tout à fait réelle…et surtout humaine ! »
Texte Neila Mhiri